ALMA

La Société Coopérative et Participative, (SCOP). Valorisation du travail et pérennité de l’entreprise priment sur rentabilité du capital (publié sept. 2015)

Alma-Scop_01La SCOP , une histoire aussi ancienne que l’entreprise capitaliste, représente à la fois une résistance et une volonté de travailler autrement. Ce type d’entreprise reste très minoritaire et peine à se développer, bien qu’ayant fait les preuves de son efficacité. Dans un monde ou l’argent est roi, opter pour  les valeurs humaines reste une exception.

La SCOP est caractérisée par des principes intangibles : les associés doivent être majoritairement des salariés qui ont tous le même poids dans la prise de décision. Les résultats sont partagés entre les salariés, l’entreprise et les associés, selon des quotas clairement définis. Les résultats non distribués restent la propriété de l’entreprise et ne peuvent plus être distribués. Enfin, le remboursement du capital s’effectue sans aucune plus-value.

Et contrairement aux idées reçues, les SCOP se portent mieux que les entreprises traditionnelles, puisqu’elles accumulent des ressources  leur permettant de se développer et de faire face à d’éventuelles difficultés.

La SCOP ALMA en est un parfait exemple : créée en 1979 dans le secteur informatique elle est aujourd’hui une entreprise solide, indépendante financièrement, dynamique et dont le développement s’appuie sur la motivation des salariés. Bien évidemment les créateurs n’ont pas accumulé une fortune personnelle mais l’expérience de la solidarité humaine constitue, à leurs yeux, une plus grande richesse que celle de l’argent.

Des principes de la SCOP pourraient être repris et imposés aux entreprises traditionnelles, évitant ainsi fermeture et destructions d’emploi.

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Mouvement des SCOP : une histoire ancienne

Le mouvement de la coopération de production  prend naissance dans les luttes ouvrières du 19ème siècle et  les apports de théoriciens et de praticiens utopistes,  comme  Proudhon, Fourier …

A partir de  1830 , des « contrats d’association de travailleurs  » seront établis par des menuisiers, puis par des bijoutiers avec l’assistance d’un médecin philanthrope Philippe Buchez. Ces contrats sont les  précurseurs de la coopérative de production.

Le mouvement continuera, s’essoufflera et reprend vigueur à partir des années 1980 pour deux raisons.

En période de « crise », la SCOP est souvent considérée comme la dernière alternative à la fermeture d’une entreprise.

Devant l’évolution des conditions de travail dans le système traditionnel, la SCOP constitue un refuge où il fait bon travailler.

Des règles de fonctionnement privilégiant le travail et la vie de l’entreprise

Si la SCOP, société coopérative et participative, reste dans des formes juridiques traditionnelles,  SARL ou SA,  avec capital social et associés, son fonctionnement est à l’opposé du fait des cinq règles fondamentales

La première règle  concerne la détention du capital :  les salariés doivent posséder au moins 51% du capital, et sont donc majoritaires dans la prise de décision.

La deuxième règle concerne les prises de décision : les droits de vote sont égaux entre les associés, selon le principe » un homme, une voix ».

La troisième règle concerne le partage des résultats :  une part pour la rémunération du travail (entre 25% et 75%), une part pour la rémunération du capital des associés (de 0% à 33%), une part pour les réserves de l’entreprise et ses investissements (de 16% à 75%).

La quatrième règle concerne les réserves de l’entreprise : ces réserves n’appartiennent plus aux associés, elles sont la propriété de la SCOP.

La cinquième règle concerne le remboursement du capital : il est effectué pour le montant investi, aucune plus value ne peut être réalisée sur la revente des parts sociales.

Conséquences : une gouvernance à l’opposé de celle de l’entreprise capitaliste

En supprimant la suprématie du capital sur le travail, la SCOP assure la démocratie dans l’entreprise, la motivation des salariés dont l’intérêt commun est la vie et le développement de leur entreprise.

En privilégiant la constitution de réserves sur la rémunération du capital, la SCOP assure  la pérennité de l’entreprise « contrainte » de se constituer des fonds pour se développer et faire face à d’éventuelles difficultés. En outre, l’indépendance financière met la SCOP à l’abri des « requins » : la SCOP ne peut être vendue, ni délocalisée.

En interdisant toute plus value sur la revente de ses parts, la SCOP n’aura pas à rémunérer un capital qu’elle n’a pas reçu.

Très souvent, la SCOP n’est perçue  que sous un aspect négatif, car ne sont médiatisées que celles qui sont issues d’entreprises en difficulté. Les conditions de départ sont, alors, difficiles, et comme cela a été le cas pour l’entreprise Lejaby, la réussite n’est pas au rendez vous.

Mais contrairement aux idées reçues, la SCOP est une entreprise solide.

Une variante de la SCOP est la SCIC

La SCIC, société coopérative d’intérêt collectif, se distingue de la SCOP par son activité et par la nature des ses associés.

Son activité ne peut concerner que des biens ou de services d’intérêt collectif qui présentent un caractère d’utilité sociale.

Les associés doivent obligatoirement représenter trois catégories : les salariés, les bénéficiaires des biens (clients, usagers, fournisseurs, habitants) et les contributeurs à l’activité (associations, bénévoles, collectivités territoriales)

Un réseau structuré de soutien et de représentation

Aujourd’hui, les sociétés coopératives disposent d’un réseau qui propose des services, accueil, financement, formations …  accompagne la création, la reprise et la transformation d’entreprises sous forme Scop (Société coopérative de production) ou Scic (Société coopérative d’intérêt collectif).

Animé par la Confédération générale des Scop au plan national, le réseau des Scop est présent sur tout le territoire avec treize Unions régionales et trois Fédérations de métiers : BTP, communication, industrie.

Quelques données (2013) sur les SCOP et SCIC en France

Un nombre relativement faible mais en progression :  2040 SCOP  et  212 SCIC  et 45 700 salariés, dont 1 859 emplois nouveaux (solde net) pour l’année.

Une démocratie qui fonctionne :70% des salariés sont associés après 2 ans d’ancienneté.

Une représentation dans tous les secteurs d’activité :  services , construction , industrie , éducation santé  commerce , et gestion des déchets.

Une taille diversifiée avec beaucoup de petites entreprises de moins de 10 salariés, mais aussi quelques grandes entreprises de plus de 1000 salariés comme «  chèques déjeuners ».

Un partage des bénéfices valorisant effectivement le travail et le développement  de l’entreprise :  45,8 %  aux salariés sous forme de participation, 41,1 % pour l’entreprise sous forme de réserve et 13,1 % aux associés, en rémunération du capital .

Une durée de vie plus longue:  le taux de survie à 3 ans des Scop est de 76 % contre 65 % pour l’ensemble des entreprises françaises. Et sur le long terme 3,1 % des Scop ont plus de 50 ans contre 1,8 % de l’ensemble des entreprises françaises.

Un exemple : ALMA, une entreprise informatique grenobloise

En 1979, des chercheurs en mathématiques appliquées de l’université de Grenoble (IMAG) décident de créer une entreprise dans les métiers de l’informatique répondant aux besoins de la production industrielle. Dés le départ, ils choisissent le statut de SCOP.

De 1979 à 2015, Alma connaitra un développement de son activité, de son implantation géographique et bien entendu une croissance de ses effectifs salariés et associés.

En 2015, Alma est devenu un groupe de 130 personnes  qui intervient  dans quatre secteurs de l’informatique : édition de logiciels CFAO pour la tôlerie et la robotique, déploiement et maintenance d’infrastructures informatiques, développement d’applications collaboratives, intégration et édition de logiciels pour établissements hospitaliers et pharmacies.

Alma possède 5 sites en France et 5 filiales à l’étranger, en Italie, Allemagne, Chine, Brésil, Etats-Unis, ainsi qu’un réseau de distribution.

Le fonctionnement d’ALMA (site internet)

Le statut des salariés : au bout d’un an de présence, ils peuvent être associés et avoir la « citoyenneté almatienne » et de fait tous les salariés qui ont plus d’un an de présence sont associés.

La gouvernance  est assurée par un conseil d’administration et un dirigeant désignés par les salariés associés, qui ont le pouvoir de les révoquer.

Les salariés décident du partage des bénéfices, dans le cadre des règles SCOP en privilégiant « ceux qui travaillent dans l’entreprise sous forme de participation, d’intéressement » et en pensant « aux générations futures en constituant des réserves impartageables qui consolident les fonds propres et garantissent la pérennité de l’entreprise ».

Ainsi depuis la création d’ALMA, la répartition du résultat s’est effectuée selon le principe suivant : 50% est distribué aux salariés, 10% aux salariés associés sous forme de dividendes et 40% du résultat est mis en réserve dans l’entreprise et reste la propriété de l’entreprise. Contrairement aux entreprises capitalistes, aucun associé ne peut revendiquer une part de ses réserves.

La hiérarchie des salaires est relativement faible :  le rapport entre le plus haut et le plus bas revenu est de 2,36.

Le développement d’ALMA est ainsi assuré par la cohésion et la motivation de l’équipe de salariés et son indépendance financière est garantie.

Les données financières d’Alma

Depuis sa création la société a toujours été bénéficiaire, et son  chiffre d’affaires a progressé, avec quelques fluctuations conjoncturelles.

En 2014, le chiffre d’affaires est 8,4 millions € pour la seule société Alma et de 11 millions € pour l’ensemble du Groupe, en progression de 7% par rapport à l’année précédente.

Sur les dix dernières années, le résultat a varié entre 0,6 million € et 1,8 million €. Grace aux réserves engrangées depuis la création, un montant de 9,7 millions € , la SCOP a tous les moyens de faire face à d’éventuelles difficultés et garde une totale autonomie financière.

Cet exemple montre que des créateurs d’entreprise peuvent avoir d’autres buts que la recherche du profit personnel : dividendes et plus values sur revente d’entreprise.

Ces autres objectifs sont déclinés sur le site d’Alma dans l’onglet « valeurs, culture ». Parmi les 9 principes qui animent « l’esprit d’Alma », on citera : le plaisir de travailler ensemble, la liberté d’expression, le souci d’égalité et le partage de la richesse créée.

On est bien loin de la compétition, de la pression, de l’obsession de la marge …et de la crainte d’être revendu, pressuré et fermé selon le bon vouloir de l’actionnaire.

Sources

  • Sites internet de la Confédération générale des SCOP et de la société ALMA
  • Comptes financiers de la société ALMA
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