Rachat d’actions

publié sept. 2015

Autorisé aux USA depuis 1980 et en France depuis 1998, le rachat de ses propres actions par l’entreprise peut avoir trois raisons dont l’une est terriblement dangereuse comme l’a souligné Jean Marc Vittori dans le journal « les Echos » du 3 mars 2015  « Quand le capitalisme en vient à se mordre la queue »

La première raison, la plus fréquente, la plus coûteuse et la plus dangereuse

Le principe est le suivant : l’entreprise rachète ses propres actions pour les détruire, c’est un coût net pour l’entreprise qui bénéficie exclusivement à l’actionnaire.

Explication à partir de l’exemple du Groupe Bouygues

Le 31 août 2011, le groupe Bouygues lance une offre publique de rachat sur ses propres actions au prix de 30 € l’action alors que le cours de bourse est de 23 €. Dans cette opération tous  les actionnaires sont gagnants . Celui qui vend perçoit un bonus de 7€, celui qui conserve l’action se verra aussi « récompensé » de 2 manières. La première , c’est la valorisation immédiate de l’action, le cours de l’action bondit de 10%. La deuxième, c’est l’augmentation du bénéfice par action et donc du dividendes, simple conséquence mathématique de la diminution du nombre d’actions, du fait de la destruction d’une partie d’entre elles.

Dans cette opération, le Groupe Bouygues consacrera 1,25 milliard €, ce qui représente une charge nette  pour l’entreprise et un nouveau pactole pour l’actionnaire.

Aux USA en 2014, les entreprises ont ainsi dépensé 100 milliards € , en pure perte pour les entreprises. En France, ce sont 10 milliards € dépensés de cette manière, ce qui fait dire à JM VITTORI, dans les Echos que le capitalisme est en pleine contradiction, en détruisant les ressources financières plutôt que de les consacrer à la croissance et au développement de l’entreprise.

Extrait de l’article des Echos du 3 mars 2015 de JM VITTORI.

« Non, désolé, j’ai vraiment trop d’argent. je ne sais pas quoi en faire. Je préfère vous le rendre. Ce message sidérant ne vient pas d’un Etat confetti brusquement enrichi ou d’un milliardaire illuminé d’un coup par la lutte contre la pauvreté prônée par le pape François, mais… des grandes entreprises américaines. l’an dernier, elles ont gagné de l’argent comme jamais.Leurs bénéfices dépassent 12% du PIB, un record historique, deux fois plus que la moyenne de long terme.Celles qui font partie de l’indice boursier S&P 500 ont rentré plus de 1000 milliards de dollars de profits. Elles en ont versé un tiers (350 milliards) à leurs actionnaires sous forme de dividendes, une proportion assez classique. Mais elles leur ont aussi racheté des actions pour plus de 550 milliards, le plus souvent, pour les détruire. Trois quart d’entre elles sont des adeptes de ce « buyback » comme on dit aux Etats-Unis. C’est le cœur du capitalisme qui est touché ……

C’est ici que le capitalisme se mord la queue. Le projet, l’investissement et le partage des risques ont été la raison d’être de la société par actions, pour financer une mine de cuivre en Suède dés le XIIème siècle, les grandes routes maritimes au XVIéme siècle, les usines et les machines de la révolution industrielle au XIXème siècle. Aujourd’hui, le projet disparaît peu à peu des grandes entreprises cotées. Leurs actionnaires ne sont plus là pour apporter de l’argent mais pour en extraire. D’où la montée des questions sur la répartition des revenus (aux Etats-Unis, 1% des particuliers détiennent 40% des actions). D’où, aussi, les interrogations majeures sur les grandes innovations à venir. Relèvent-elles de l’illusion, viendront-elles d’autres lieux que les entreprises où elles se sont épanouies depuis un siècle et demi ? Au fond le « buyback » symbolise le bye bye au capitalisme du siècle dernier »

Dans l’Humanité Dimanche du 12 mai 2015, un cri d’alarme est lancé « les stars de la Bourse de Paris sont prises à nouveau d’une véritable frénésie de rachat de leurs propres actions. Elles pourraient y consacrer cette année jusqu’à 15 milliards €, après 10 milliards en 2014 » … « 5 milliards €, le montant du nouveau programme de rachat d’actions d’Airbus »

La deuxième raison  : développer des outils de motivation de ses salariés.

Les propres actions rachetées ne seront pas détruites mais attribuées à des salariés, très souvent cadres supérieurs. Ceux-ci seront ainsi convertis aux vertus du « Bénéfice par action » et à la recherche d’une plus value future au moment de la revente du titre

La troisième raison : volonté de détenir ses propres actions

Ses propres actions peuvent servir de monnaie d’échange et ainsi permettre à l’entreprise de négocier plus facilement un rachat,  en proposant  d’échanger ses actions contre celles d’une autre entreprise.

Par la détention de ses propres actions, l’entreprise augmente son contrôle et peut limiter les possibilités d’une offre publique de rachat hostile.

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