Le CETA et les 266 députés illettrés ou corr …?
publié le 25/07/2019
Le mercredi 23 juillet 2019, 266 députés ont voté l’accord de libre échange avec le Canada (CETA).Pourtant, ils auraient dû être parfaitement conscients de la profonde dangerosité de cet accord pour la population : Sont ils illettrés ou servent ils les intérêts des milliardaires, seuls bénéficiaires de cet accord ?
En effet, les députés ont été destinataires de deux documents établis à leur intention et qui soulignaient les aspects très nocifs de cet accord :
Un rapport du CEPII rendu le 12 juin 2019, devant être annexé au projet de loi
« Le présent rapport, à destination des parlementaires français, propose une quantification macroéconomique, sectorielle et environnementale des effets de cet accord. »
Une étude commandée par le gouvernement intitulée : Rapport au Premier ministre
L’impact de l’Accord Économique et Commercial Global entre l’Union européenne et le Canada (AECG/CETA) sur l’environnement, le climat et la santé :
Par lettre de mission du 5 juillet 2017 adressée à la présidente Katheline Schubert, le Premier ministre a demandé à notre commission « d’apporter un éclairage objectif, scientifique et quantitatif quant à l’impact du CETA sur l’environnement, le climat et la santé, dans le cas d’une mise en oeuvre de l’intégralité des dispositions de l’accord ».
La procédure suivie, véritable déni de démocratie
Cet accord de libre échange est entré en application, provisoire, le 21 septembre 2017, avant même d’avoir été ratifié par les parlements des États membres de l’Union européenne (UE).
Pour être soumis aux votes des élus de la Nation, il fallait attendre une décision de la cour de justice européenne :
Le 30 avril 2019, la Cour de Justice européenne a confirmé que le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États contenu dans l’accord était compatible avec le droit de l’Union européenne, levant le dernier obstacle légal au processus de ratification
Et les multinationales n’ont pas voulu patienter deux ans pour engranger leurs bénéfices liés à cet accord et ont exigé de l’Europe cette mise en oeuvre dés 2017, alors que rien ne garantissait que ce traité serait ratifié par les parlements nationaux.
Et les élus de la majorité présidentielle n’ont émis aucune protestation face à cette usurpation de leur pouvoir.
Des destructions d’emplois plutôt que des créations
Des créations hypothétiques pour l’ensemble de l’économie
Selon le rapport du CEPII
Quand la France importe plus du Canada, cela n’est pas nécessairement uniquement une part de marché prise aux producteurs français.
Traduite en langage clair, cette phrase signifie qu’une part importante des achats au Canada peut s’effectuer au détriment de la production française et donc des emplois
Inversement, le surcroît d’exportations françaises vers le Canada ne représente pas nécessairement une augmentation équivalente des exportations françaises vers le monde entier.
Traduite en langage clair , cette phrase signifie qu’une part des ventes réalisées au Canada ne générera pas de production supplémentaire en France, donc pas d’emploi, car il pourra s’agir, le plus souvent, d’un simple changement de destination.
Des destructions d’emplois pour l’agriculture
Selon le rapport Schubert
Dans le cadre d’une libéralisation des échanges, les agriculteurs européens pourraient être pénalisés par des coûts de production plus élevés, les règles européennes ayant souvent comme conséquence des itinéraires techniques plus coûteux en équipement et/ou en travail, la réalisation d’investissements non directement productifs (traitement du lisier, aménagement des bâtiments d’élevage…) ou des coûts de transport plus élevés.
En France, comme dans le reste de l’UE, ce sont les élevages bovins allaitants qui seront touchés.
Les élevages allaitants sont particulièrement concentrés dans certaines régions françaises (Massif central, Cher, Nièvre, etc.) où ils constituent l’essentiel de l’activité agricole. La disparition de ces exploitations aurait des conséquences négatives sur le maintien de l’activité de ces territoires au travers des emplois directs, mais aussi indirects et induits.
Cette analyse de l’impact du CETA sur l’agriculture tombe comme un couperet pour les exploitants agricoles de régions désertifiées, avec pour conséquence des pertes d’emplois certaines pour des populations rurales déjà fragilisées et l’aggravation des drames personnels conduisant parfois au suicide.
Ces deux paragraphes auraient dû inciter les députés à s’opposer à cet accord, mais la force des lobbys de l’argent ôte tout scrupule.
Un danger pour notre santé
Il suffit de citer des extraits du rapports Schubert concernant les différences entre le Canada et l’Europe en matière de santé publique, pour s’en convaincre :
Des conceptions et des approches différentes en matière de santé publique
Il existe des différences majeures d’évaluation et de gestion du risque en matière de santé publique entre l’UE et le Canada.
L’UE prône et met en oeuvre le principe de précaution
Dans l’UE, la maîtrise sanitaire porte sur toutes les étapes de la chaîne d’alimentation
Et le rapport constate que malgré ces différences, rien n’est prévu dans l’accord pour contraindre le Canada à respecter les mêmes normes qu’en Europe
Il apparaît que rien n’est prévu dans l’accord CETA en ce qui concerne :
– l’alimentation des animaux (utilisation de farines animales et de maïs et soja OGM, résidus de pesticides…),
– l’utilisation des médicaments vétérinaires (notamment des antibiotiques) en élevage,
– le bien-être des animaux (élevage, transport et abattage).
Et certaines précisions apportées ne font que confirmer le danger
Les réglementations européennes et canadiennes en la matière diffèrent : les anabolisants et les antibiotiques utilisés comme facteurs de croissance sont interdits dans l’UE alors qu’ils sont autorisés au Canada.
Le CETA laisse la possibilité au Canada d’utiliser des facteurs de croissance contenant des antibiotiques, avec toutefois des contraintes de délais d’attente et d’absence de résidus.S’assurer de la qualité du contrôle des filières sans hormones et sans ractopamine :
Rien ne figure dans le CETA sur l’adaptation nécessaire de l’organisation des contrôles.
Quant à la décontamination des carcasses, cela fait froid dans le dos :
La réglementation canadienne autorise le rinçage et le traitement au chlore de la viande de boeuf et de poulet, interdits en Europe. Très récemment, en juin 2017, le Canada a indiqué souhaiter introduire une demande d’utilisation de l’acide citrique et de l’acide péroxyacétique. Si l’Europe accédait à de telles demandes, cela pourrait à terme remettre en question le modèle de sécurité sanitaire des aliments européen.
Et une accélération du réchauffement climatique
Des transports plus importants
La conséquence immédiate d’une augmentation des échanges est la hausse des transports et donc des émissions de CO 2
Un double impact négatif dans l’agriculture
Pour survivre les agriculteurs pourraient adopter des comportements anti écologiques :
La culture des OGM tolérants au glyphosate pose en effet un véritable problème pour l’environnement, avec le développement de la résistance des adventices à ce pesticide58.
Ce type de développement apparaît contradictoire avec les objectifs de transition écologique souhaités pour l’agriculture, qui reposent notamment sur la mise en oeuvre de rotations longues et diversifiées, permettant de réduire la consommation de pesticides et d’engrais grâce aux complémentarités entre les espèces cultivées.
La réduction de l’élevage bovin allaitant entraînera celle des prairies permanentes et, par voie de conséquence, une augmentation des Gaz à Effet de Serre (GES) :
En France, comme dans le reste de l’UE, ce sont les élevages bovins allaitants qui seront touchés. Or ceux-ci reposent essentiellement sur l’utilisation de prairies le plus souvent permanentes, qui sont fauchées et pâturées, avec un niveau de chargement qui permet un niveau de stockage de carbone élevé64. La prairie permanente et le pâturage sont les leviers mis en avant par l’INRA et l’ADEME pour réduire les émissions de GES par l’agriculture car ilspermettent le stockage de carbone et la réduction des émissions de N2O de l’élevage, réduction des émissions directes, mais aussi indirectes (engrais, aliments du bétail, cultures fourragères annuelles…).
La conclusion sur l’écologie est sans ambiguité :
On peut regretter que cet accord de nouvelle génération ne prenne pas mieux en compte les objectifs de lutte contre le réchauffement climatique et de développement durable en promouvant de manière ambitieuse la mise en place de systèmes agro-alimentaires locaux et territorialisés, reliant consommateurs et producteurs en limitant les besoins de transformation et de transport des denrées alimentaires.
Des Etats mis sous tutelle des multinationales
Le dernier point, et pas des moindres, concerne la « protection des investisseurs », qui de fait revient mettre les Etats sous sous tutelle des multinationales et ceci à 4 niveaux.
Premièrement, l’investisseur peut délibérément enfreindre les réglementations sanitaires, environnementales et sociales du pays sans encourir la moindre sanction :
Le CETA paraît d’autant plus en retrait sur cette question qu’il ne contient pas non plus de disposition qui rappelle l’obligation des investisseurs de se conformer aux lois environnementales, sociales et sanitaires de l’État hôte ni de disposition permettant, dans le cadre d’un différend opposant un investisseur à un État une demande reconventionnelle contre l’investisseur qui ne respecte pas les lois de l’État d’accueil.
Deuxièmement : quant un Etat, lui, prend une nouvelle disposition visant à protéger l’environnement et la santé des habitants, il pourrait se voir attaquer par un investisseur si celui-ci considère qu’il est lésé par cette nouvelle disposition :
Tous les types de mesures qu’une Partie contractante peut adopter en vue de la protection de l’environnement ou de la santé peuvent, dès lors qu’ils sont considérés comme générateurs d’un préjudice, faire l’objet d’une plainte.
La Partie contractante désigne l’État.
Troisièmement , ce sont des tribunaux spéciaux créés par les multinationales qui seront saisis des litiges : les tribunaux d’arbitrage bien plus favorables à leurs intérêts :
Il permet, d’autre part, aux investisseurs étrangers d’accéder à un système de justice particulier
– l’Investment Court System – qui leur est exclusivement dédié, en cas de différend dans lequel ils allèguent une perte ou un dommage dû à une violation par une Partie contractante de ses obligationsIl continue de permettre aux investisseurs étrangers d’échapper à la compétence des juges nationaux.
Or, on se rend compte que les indemnisations octroyées aux investisseurs étrangers sur la base des traités d’investissement, quand leurs requêtes prospèrent, sont sans commune mesure avec celles qui pourraient être décidées par les juges nationaux.
Il existe de nombreux exemples de coûts exorbitants réclamés et obtenus par ces multinationales.
Quatrièmement : lorsque un Etat veut nationaliser ou exproprier un investisseur étranger, il lui doit
un traitement juste et équitable ainsi qu’une protection et une sécurité intégrales (article 8.10) ; le droit au paiement d’une indemnité prompte, adéquate et effective en cas de nationalisation, d’expropriation directe ou indirecte ou de toute mesure ayant un effet équivalent à une nationalisation ou à une expropriation (article 8.12) et le libre transfert des fonds liés à l’investissement (article 8.13).
La clause de traitement juste et équitable est de celles qui ont été les plus critiquées non seulement parce que la définition de ce qui est « juste » et « équitable » est extrêmement vague mais aussi parce que certains tribunaux arbitraux y ont vu la source d’obligations extrêmement contraignantes, comme la protection des attentes légitimes de l’investisseur étranger.
Et les attentes légitimes d’un investisseur peuvent atteindre des sommes astronomiques décourageant ainsi un Etat à procéder à une nationalisation.
Sur les appétits des investisseurs canadiens, vous pouvez consulter l’article sur Orpéa et les EHPAD sur le site cuisine des patrons
Ainsi voici en quelques lignes, les graves méfaits du CETA, tels qu’il ont été dénoncés dans un document très officiel établi à destination des parlementaires.
Et pourtant 266 députés, en majeure partie la République En Marche ont osé voter cet accord, le 23 juillet 2019, en pleine période de canicule et de réchauffement climatique.
74 députés, dont 52 de la République En Marche n’ont pas osé le voter mais n’ont pas eu le courage non plus de leurs opinions et se sont abstenus.
Enfin 213 députés ont voté contre, dont 9 très courageux de la république en marche.
Et ce n’est pas fini, un prochain accord de libre échange avec l’Amérique latine, le Mercosur, va être soumis au vote des députés
Stoppons tous cette marche mortifère, il en va de la survie de la planète et de l’avenir de nos enfants et aussi dans l’immédiat de nos retraites et de notre pouvoir d’achat.
Sources :
Rapport au Premier ministre
L’impact de l’Accord Économique et Commercial Global entre l’Union européenne et le Canada (AECG/CETA) sur l’environnement, le climat et la santé
Rapport d’étude CEPII :
Évaluation macro-économique des impacts de l’Accord économique et commercial global entre le Canada et l’Union européenne
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